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lundi 16 juillet 2012

Le colosse aux pieds d'argile

Dotée de ressources énormes et qualifiée de scandale géologique, à cheval sur l’équateur et s’étendant sur deux fuseaux horaires, la République Démocratique du Congo est un géant situé au cœur du continent africain et sert de trait d’union entre l’Afrique de l’Est, l’Afrique australe ainsi que quelques pays d’Afrique centrale. Ce pays, qui plus est une incontournable puissance économique aussi bien dans la sous-région qu’à l’échelle continentale, occupe de facto une situation géostratégique non négligeable. Malheureusement, même avec ses potentiels énormes, il reste de nos jours un géant aux pieds d’argile, une puissance virtuelle qui ne cesse de se chercher et qui peine à décoller. Cela est dû non seulement à l’incapacité de ses dirigeants et de son élite à impulser une nouvelle dynamique, mais aussi à l’insécurité qui y règne.

La carte de la République Démocratique du Congo

Une instabilité chronique
Depuis l’accession de la République Démocratique du Congo à l’indépendance, le 30 juin 1960, le contexte politique local est sans cesse caractérisé par l’instabilité chronique, la faiblesse de ses institutions étatiques ainsi que de sa culture politique, et l’ingérence extérieure. Dévastée par les conséquences de la « première guerre internationale africaine» survenue en août 1998, et de longues années de crise, ce pays est confronté à plusieurs défis internes et externes : la restauration de l’intégrité territoriale, l’affirmation de la souveraineté politique, la réunification administrative, la consolidation de la cohésion nationale, la mise en place d’un appareil d’État performant et transparent, la consolidation des structures étatiques représentatives, la reconstruction des infrastructures, la démobilisation et la réinsertion sociale des groupes armés, la réforme de l’armée nationale, la gestion durable et responsable des ressources naturelles, et la poursuite de l’amélioration du niveau dedéveloppement humain de l’ensemble de la population congolaise.
La mascarade électorale
Après une transition militaro-politique chaotique, ponctuée de violents affrontements entre factions ennemies, la République Démocratique du Congo a connu en 2006 un processus électoral que, aux dires de quelques observateurs, a été émaillé de fraudes à maints égards. Entaché d’irrégularités flagrantes, ce mécanisme, qui n’était démocratique que de « qualificatif », a été vicié par le bourrage massif d’urnes et la manipulation des bulletins de vote surnuméraires. Il a été faussé, lors du second tour, par des résultats fallacieux entre les deux candidats en lice ayant concouru au suffrage populaire et postulé à la magistrature suprême. Par conséquent, à la suite d’une élection présidentielle sujette à caution, c’est le général-major Joseph Kabila Kabange qui a été récompensé au détriment de son concurrent Jean-Pierre Bemba Gombo.

À la suite du changement du dispositif constitutionnel relatif à l’élection présidentielle, dont le mode de scrutin était passé des deux tours à un seul, la commission électorale nationale indépendante(CENI) a annoncé le 9 décembre 2011 la réélection du président sortant contre son rival Étienne Tshisekedi wa Mulumba, le président de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS). Cela a suscité le refus catégorique du présumé perdant, qui s’est autoproclamé dans la foulée président de la République. Bien entendu, la vision de plus de 51 % des Congolais était différente de celle de lamouvance kabiliste. L’élection présidentielle à un seul tour n’a fait qu’affaiblir considérablement un président de la République élu par une minorité de votants.
Le leadership défaillant
En République Démocratique du Congo, les dirigeants politiques n’ont que rarement conscience de leurs responsabilités. Ignorant le bien-fondé et l’essence même de la chose publique, ils méconnaissent par-dessus le marché les mobiles de leur élection ou de leur nomination à un poste de responsabilité, fût-elle politique ou gouvernementale.
À deux reprises, la classe politique congolaise a manqué de leadership politique et moral dans le dossier de la réconciliation nationale et de l’unité politique de la Nation. En 2006 et en 2011, après son élection et sa réélection, le président Joseph Kabila aurait dû engager la République Démocratique du Congo sur la voie de la concorde politique et de la réconciliation nationale. Une telle initiative aurait dû être couronnée par l’annonce des mesures concrètes en vue de sceller la paix et l’harmonie, la solidarité et la fraternité. Cette classe politique a aussi failli car, si elle avait mis en œuvre l’Accord de paix inter-congolais de Pretoria, la question d’une armée nationale républicaine intégrée et unifiée ne se serait même point posée. Elle a plutôt préféré laisser pourrir la situation, afin de tirer un avantage politique certain en cas de conflagration armée.
L’irresponsabilité de la classe politique s’est également avérée dans le dossier relatif à la nationalité. En refusant de procéder au recensement de la population, les autorités congolaises ont permis l’infiltration des institutions de la République par des personnes étrangères et facilité les fraudes électorales grâce au vote des ressortissants des pays frontaliers.
Le déficit du leadership concerne au plus haut point la crise au sein de la fonction publique, de l’univers hospitalier, de l’espace académique et scolaire, de l’institution militaire (les FARDC)... Cette carence relève aussi bien de la mauvaise foi que de l’incapacité politique. Elle témoigne de l’inconscience des dirigeants qui gouvernent et administrent le pays au profit des intérêts personnels. La classe politique a contribué, par sa négligence consciente et son comportement irresponsable, à la destruction pure et simple de l’État congolais. Ainsi est-elle à l’origine de la déstabilisation de la partie orientale.
L’inexistence de l’État
Le gouvernement congolais ne parvient guère à mâter les différentes forces rebelles opérant dans le territoire national. Celles-ci profitent de la porosité des frontières, de l’inexistence de l’État et du soutien des pays frontalier pour déstabiliser la République Démocratique du Congo. Elles bénéficient de la connivence des dirigeants nationaux pour piller les richesses. Par conséquent, ces défaillances montrent à quel point la population meurtrie est abandonnée à elle-même. Celle-ci ne sait plus à quel saint se vouer, car elle est la première victime de l’incompétence de ses propres dirigeants politiques et gouvernementaux.

Il convient de souligner que le gouvernement congolais est incapable d’imposer l’autorité politique, la puissance publique de l’État sur l’ensemble du territoire national. Il est incapable d’apporter la paix et la sécurité à ses concitoyens victimes de la déstabilisation diligentée à partir de quelques pays limitrophes, notamment dans la partie orientale. À vrai dire, il est incapable de protéger ses compatriotes contre les forces armées irrégulières et négatives comptables de viol des femmes, de vol des biens appartenant aux citoyens innocents ainsi que de crimes contre l’Humanité et crimes de guerre à l’origine du génocide congolais. Il est incapable de neutraliser les militaires inciviques qui s’en prennent gratuitement aux paisibles civils.

Au vu des éléments évoqués supra, la réforme en profondeur l’Étatcongolais s’impose. Elle représente le chantier capital qui dotera la République Démocratique du Congo d’un socle national pouvant lui permettre de réussir la décentralisation, de faciliter les investissements et d’affronter l’avenir en toute sérénité.
Une diplomatie moribonde
Nombreux sont donc les tâches auxquelles les autorités congolaises devront s’atteler en urgence. Il est primordial d’instaurer la paix et la sécurité en mettant un terme aux nombreux conflits internes et régionaux, aux drames et aux gâchis humains en cours – notamment à la frontière avec le Rwanda, le Burundi et l’Ouganda. La mise en place d’une diplomatie intelligente ne pourra que contribuer au retour au Rwanda des éléments des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) basés à l’Est de la République Démocratique du Congo, ou leur installation dans un pays non limitrophe. D’aucuns savent que le dialogue inter-rwandais est un facteur déterminant en vue de la stabilisation de la région des grands lacs.
La diplomatie congolaise doit à tout prix œuvrer en faveur de la paix et de la sécurité régionale. Ainsi le Congo Kinshasa doit-il encourager l’amélioration de la gestion des ressources naturelles, notamment en demandant aux entreprises de respecter les lois congolaises et internationales comme la loi des États-Unis concernant la pratique de la corruption à l’étranger (FCPA), ou la Convention de l’OCDE sur la lutte contre la corruption d’agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales. Dans une société de plus en plus mondialisée, le gouvernement congolais ne pourra qu’être favorable à la Solidarité internationale et à la Paix, mais à condition qu’elles ne se fassent pas au détriment des intérêts de son peuple et du panafricanisme.
Une armée non aguerrie
Force est de constater que les conflits fonciers meurtriers ont déstabilisé l’État congolais. Celui ne peut guère y faire face, puisqu’il ne dispose pas d’une armée capable de défendre l’intégrité territoriale et lasouveraineté des institutions politiques. Or, la fin de l’insécurité dans la région du Kivu passera, entre autres, par la mise sur pied d’une armée congolaise à la fois aguerrie et républicaine.
Combien de fois, lors de différentes confrontations avec les rebelles du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP), la hiérarchie militaire avait-elle privé les soldats de l’armée régulière de leur solde mensuelle pour les empêcher de combattre les forces ennemies avec bravoure et détermination ? Combien de fois des chefs d’état-major des FARDC, qui ont réussi à mettre au pas les rébellions ou les mutins, ont-ils été déchargés de leurs fonctions au profit des étrangers infiltrés dans la chaîne de commandement de l’armée nationale congolaise ? L’institution militaire, qui devrait être au cœur de la défense de la Nation et de la souveraineté de l’État, est quasiment inopérationnelle. Ainsi les autorités congolaises encouragent-elles le démembrement de l’État, c’est-à-dire la désintégration de la Nation.

Le Congo d’avenir
Après ce constat catastrophique, il revient aux fils et filles de la République Démocratique du Congo de déterminer, de la manière la plus lucide qui soit, le chemin à suivre en vue d’assurer leur avenir collectif. Cette voie salutaire, telle que l’ont toujours imaginée et conçue leurs aïeux, doit permettre à la Nation congolaise et aux générations futures de vivre, sans contrainte et sans entrave, la liberté et la démocratie, la justice et la sécurité, la paix et la concorde politique, l’unité du pays et la réconciliation nationale. D’aucuns sont tout à fait conscients que cela ne sera possible que si le Congo-Kinshasa se dote d’une diplomatie performante et d’une armée citoyenne très performante. Ces deux institutions permettront de consolider, sur le plan régional, une sorte de sécurité globale. Mais encore faudra-t-il que les Congolaises et les Congolais puissent pousser leur classe politique à tendre davantage vers l’excellence.

Documentation
- La République Démocratique du Congo, un combat pour la survie – Gaspard-Hubert Lonsi Koko, Édition L’Harmattan, Paris, 2010
- Congo-Kinshasa, le degré zéro de la politique – Gaspard-Hubert Lonsi Koko, Édition L’Harmattan, 2011.



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